Le prix Nobel de la paix, Mohammad Yunus, l'un des pionniers du micro-crédit, estime qu'il faut "mettre de l'ordre" dans ce type de prêts destinés aux plus nécessiteux après de récents scandales en Inde, dans un entretien au journal La Croix. "Je suis inquiet. Certaines personnes ont pris une mauvaise direction et ont franchi la ligne jaune, en prêtant n'importe comment, avec souvent des objectifs assez éloignés de leur mission. Dans certains cas, le micro-crédit est devenu une sorte de crédit à la consommation servant à financer les achats courants des ménages", déplore-t-il.
"Il faut condamner ces errements et mettre rapidement de l'ordre. Si l'on ne fait rien tout de suite, d'autres acteurs se lanceront sur ce secteur en faisant la même chose, car l'Inde est un pays où les besoins sont immenses. Je plaide, par exemple, pour imposer un code de bonne conduite aux institutions de microfinance. Ce serait une manière de séparer ceux qui font du micro-crédit de ceux qui n'en font pas", explique-t-il. "Il faut aussi mettre en place une limite sur les taux d'intérêt pratiqués. Le bon niveau serait d'ajouter 10% au coût de la ressource, afin de couvrir les frais de fonctionnement. Ce qui représente des taux autour de 20%. À ce niveau, tout le monde est gagnant", ajoute-t-il.
A la question de savoir si les institutions de microfinance ont vocation à faire des bénéfices, comme la société SKS introduite en Bourse en Inde, il a indiqué: "cela a été une erreur fondamentale et un mauvais signal. Le micro-crédit ne doit pas être présenté comme une opportunité pour gagner de l'argent. Il doit d'abord servir à créer de l'activité, à permettre aux plus démunis d'avoir un métier".
lefigaro.fr
07/12/2010