C’est aujourd’hui que prend fin à Addis-Abeba, la 5ème Conférence africaine de la microfinance. Lors de cette rencontre, une note attribuée aux participants a rappelé le premier rang occupé par le Maroc dans l’octroi de microcrédits. La Loi de finances de 1999, l’existence d’institutions de microfinance supervisées par Bank Al Maghrib... Autant de facteurs qui ont permis un tel résultat. Cependant, certaines voix parlent de crise de la microfinance au Maroc.
Jusqu'en 2009, 66% des microcrédits ont profité aux femmes.
La note dont ont pris connaissance les conférenciers réunis à Addis-Abeba (Ethiopie) est en réalité la synthèse d’une enquête réalisée en 2010 par le CGAP (Consultative Group to Assist the Poor, basé à Washington), un consortium de 33 bailleurs de fonds mettant en œuvre des systèmes financiers adaptés aux besoins des couches défavorisées.
Sur le Maroc, le CGAP note que: “Reconnu comme un champion du microcrédit, servant 40% des clients dans le monde arabe, il (le Maroc) compte certaines des institutions de microfinance (IMF) les plus performantes au plan international”. Entre 2003 et 2007, le montant des prêts a été multiplié par onze et la clientèle bénéficiaire par quatre.
Un secteur concentré
Conçue comme un outil de lutte contre la précarité par la création d’activités génératrices de revenus, la microfinance est apparue au Maroc au milieu des années 1990 qui verront l’éclosion de nombreuses IMF. À ce sujet, le CGAP souligne cependant que “le secteur est hautement concentré et les quatre principales IMF totalisent 90% des services auprès de la clientèle”.
À l’origine, la Loi de finances 1999
Devant l’apparition de cette panoplie d’institutions, il devenait impératif de les doter d’un cadre juridique adéquat. Cette régularisation interviendra à la faveur de la Loi de finances 1999 dont l’un des articles précise: “Est considéré comme micro-crédit tout crédit dont l’objet est de permettre à des personnes économiquement faibles de créer ou de développer leur propre activité de production (...). Le montant du microcrédit, qui ne peut excéder 50.000 DH, est fixé par décret”. Cette législation se verra renforcée en 2007, année à partir de laquelle Bank Al-Maghrib a pris en charge la supervision des IMF.
Le peloton de tête
Le CGAP fixe a quatre les IMF qui concentrent le plus d'activités: Fondation des Banques Populaires, Fondep, Zakoura et Al Amana. Ces deux dernières ont reçu plusieurs prix internationaux (dont le prix du MIX récompensant les IMF les plus performantes et le Prix européen de la microfinance).
Lors de la présentation de ses résultats semestriels la semaine écoulée, la Banque Populaire a indiqué avoir accordé plus de 91.000 nouveaux prêts aux petits projets et contribué ainsi à la création de 115 entreprises depuis le début de l’année.
S’agissant de la fondation Zakoura, son fondateur, Noureddine Ayouch, a déclaré dans un entretien à aufait que “la fondation a créé 370 écoles, alphabétisé plus de 75.000 adultes, formé 17.000 jeunes, sensibilisé 11.600 femmes aux notions d’hygiène. 1.000 enfants ont été préscolarisés, 800 enfants de l’école publique ont bénéficié de soutien scolaire. Enfin, 2.073 salariés ont été alphabétisés en entreprise”. Actuellement c’est la Banque Populaire qui gère la fondation Zakoura pour le microcrédit.
De son côté la Fondep dit avoir, à juin 2011, avec un portefeuille de plus de 712 millions DH, accordé 134.832 prêts actifs dont un peu plus de la moitié a bénéficié aux femmes. La Fondep est spécialisée dans le soutien aux très petites entreprises.
Enfin, Al Amana a servi depuis sa création à fin juillet 2011, 2.967.000 prêts dont 1.479.000 aux femmes, pour un cumul d’encours déboursé de 20.327 milliards DH.
4.865 milliards DH
Jusqu'en 2009, 4.865 milliards DH ont été accordés sous forme de microcrédits pour 924.966 prêts actifs. 66% de ces prêts ont bénéficié aux femmes.
Une crise et une riposte
Cependant, et à partir de 2007, Les portefeuilles à risque ont commencé à augmenter de manière significative. Le CGAP souligne que “la hausse brutale des portefeuilles à risque (PAR) a eu lieu en 2008 et a affecté toutes les IMF. En décembre 2008, le PAR était de 5%, et il atteignait le niveau alarmant de 10% en juin 2009”.
Pour y faire face, le gouvernement a mis en place, en collaboration avec Bank Al-Maghrib et la Fédération nationale des associations de microcrédit un plan de consolidation. Les quatre priorités de ce plan sont, selon le portail de la microfinance: renforcer les IMF, contrôler le crédit croisé et prévenir le surendettement, sécuriser la liquidité et améliorer le cadre réglementaire.
Samir Benmalek